Inédits

Par Opus54

 

Ces notes de mémorisation se rapportent à l’exécution de la transcription pour piano de la Symphonie Fantastique de Berlioz par Franz Liszt.

 

Vue d’ensemble:

 

Tonalités:

Do (premier mouvement)

La (second mouvement)

Fa (troisième mouvement)

Si bémol (quatrième mouvement)

Do (cinquième mouvement)

 

On pourrait chercher un leitmotiv mélodique qui soit répercuté dans l’œuvre au complet. Je n’en ai pas trouvé.

Par contre, cette structure harmonique apparaît dans l’ordre dans les huit mesures d’intro (marquées Allegro agitato e appassionato) au thème principal de la symphonie, exposé en barre 65, après l’introduction marquée largo.

 

 

Premier mouvement

Rêveries, passions.

 

1. 1: Largo

 

Deux mesures d’intro, montée chromatique en triolets vers le chant initial, barre 3.

 

 

Berlioz écrit lugubre

 

(En réponse au commentaire de Liliane:) Sans doute ce mot, au 19e siècle, n’a-t-il pas tout à fait le sens sinistre qu’on lui connaît  aujourd’hui, mais conserve intacte la définition de tristesse.

 

Commentaire personnel: Étonnant. Mais quel autre mot aurait-il pu choisir? Quel que soit le qualificatif pour désigner ce que moi j’appellerais ici une plainte, on entre de toute façon dans une subjectivité langagière. Il faudra attendre Satie pour mettre en ironie le texte littéraire commentant l’interprétation musicale. Habitude, ou tentation, qu’ont les compositeurs depuis l’époque classique (on trouve déjà des didascalies musicales chez Haydn, alors que Bach et Mozart s’y opposent farouchement). Pour revenir à Berlioz, plaintif serait incorrect, calme pourrait convenir. Or il choisit: lugubre. Lugubre fait appel à une imagerie, ou couleur, personnelle à chacun, on en a ici la preuve. Autres adjectifs possibles: douloureux, évanescent, frêle (mais-sans-trop-de-fragilité), et tant qu’à faire, j’opterais pour une périphrase: d’une pâleur invitante qui rappelle le lyrisme de Grieg.

 

1. 1. 2. Parenthèse Mozart

J’utilise l’allusion à Mozart d’un point de vue strictement pianistique et donc technique. Il s’agit, en barre 18, d’une gamme ascendante (marquée «plus vite» en référence au largo qui précède et non pas «vite», comme on l’entend souvent dans les versions orchestrales) - crescendo et rallentando invitant à un retour à la lenteur dans la très complexe mesure 24. Ce retour au tempo initial est la condition pour comprendre cette mesure faisant alterner do majeur et do mineur vers le nouveau développement.

 

1.1.3.

Barres 25 à 28

Exposition do mineur, mi bémol majeur, la bémol, si bémol dominante vers reprise de la plainte (ou chant) exposé en barre 3, mais en beaucoup moins «lugubre», au contraire, c’est une grande apparition de clarté.

 

1.1.4

Barres 29 à 49

Reprise de la plainte (initialement exposée en barre 3) en mode majeur. C’est un chant (Berlioz: ben marcato il canto). Retour au mode mineur en barres 35 et 36. Barre 37-41 reproduisent barre 11-16 du début, avec résolution, via ré bémol, en insistant par lourde descende chromatique, sur une assise en la bémol dans le grave.

 

1.1.5

Barres 50 à 65

Premier déploiement en construction d’arpèges en modulation chromatique, il s’agit du «finale» de l’intro avant l’exposition du thème principal de la symphonie en barre 73.

 

Mémorisation:

dominante la bémol en accord de ré bémol (50-51)

tonique la bémol (52-53) substitution la bémol sol dièse

dominante mi (bécarre) (54-55) vers

do dièse mineur (56-57)

toujours sur base (la b, sol dièse) (58-59)

accord 5/7 vers ré et si bécarres (60-61)

base en la bémol mute en la bécarre pour accord fa majeur (62)

et long crescendo s’achève en dominante sol pour do majeur initial jusqu’à 65.

 

1.2. 1 Allegro agitato e appassionato

 

Barre 1 à 8 courte intro reprenant les 4 tonalités principales de l’œuvre: do la fa (avec si bémol en prime en 6) et retour à do.

 

Barre 9: do majeur, exposition du thème en syncope.

 

Note: ce thème, le seul en fait de la Fantastique, est abondamment commenté par les musiciens à commencer par Berlioz lui-même. C’est un motif obsessionnel d’abord montré sous son aspect rythmique. Énorme difficulté de contrepoint avec l’accompagnement en main gauche sur des temps faibles. Subjectivement, ce thème n’est pas exposé dans une limpidité romantique, contrairement au grand thème passionné de la Pathétique de Tchaikowsky, par exemple. Il arrivera au même effet obsessionnel cependant, et trouvera son expressivité accrue à chacune de ses répétitions, en sorte que dès le deuxième mouvement (Un bal), notamment lorsqu’il sera servi en écho avant le coda fracassant de la valse, il sera devenu une référence.

 

Référence à quoi au juste?

 

Berlioz parle d’une passion amoureuse née d’une rêverie de son héros (épris d’une actrice incarnant Ophélie de Hamlet de Shakespeare) et virant au cauchemar à la fois burlesque et tragique, par une série de péripéties propres au genre fantastique, mêlant le réalisme aux lois inexplicables du surnaturel).

 

(Merci Monic pour la définition:-)

 

N’arrivant pas à saisir par une image unique ou par des mots la portée sentimentale que cette femme lui inspire, il avoue ne pouvoir la traduire que par une phrase musicale. On peut donc parler du thème de la Symphonie Fantastique comme d’un thème d’amour.

 

(La référence historique de Berlioz à Hamlet est autobiographique. Il avait vu la pièce à l'Odéon et s’était épris de l’actrice Harriet Smithson qui devint sa femme. La Symphonie Fantastique, accompagnée de notes explicatives dans l’abondant programme lors du concert, avait agit en quelque sorte comme une lettre d’amour à l’actrice.)

 

Ce thème d’amour est donc exposé des barres 9 à 48. Il est en do majeur.

 

Barre 49 à 88

 

Commentaire complexe marqué animato, servant de transition entre le thème principal et un second thème, plus triomphal, exposé en barre 89. (Thème 2)

En 72, mémorisation fa mineur, deux fois, modulation vers mi naturel dominante la mineur (barre 78) en passant par médiation ré bémol en sol bémol (barre 76) et dominante mi bécarre (77).

barre 78 descente mi-do la, commentaire si bémol

barre 79 descende fa majeur (do-la-fa) commentaire sol

barre 80 descente ré mineur (la-fa-ré) commentaire mi bémol

et remontée, toujours en accélérant (marqué poco a poco agitato) de 81 à 84 avec séquence modulation (2 tonalités par mesure, dans l’ordre):

la b maj - ré b maj

fa dièse - si maj

mi mineur - la mineur

aboutit sur dominante ré trémolo ré mi bémol en main gauche, insiste sur 4 mesures identiques de 84 à 88 pour exposer en 89 le Thème 2.

 

1.2.2

 

Ce thème 2 est en fait le coda du thème initial, mais Berlioz s’en servira comme d’un thème à part, notamment pour conclure ce premier mouvement intitulé Rêveries, passions.

Il apparaît en 89 et va jusqu’en 106.

 

En 106, la barre de reprise (rarement exécutée) apparaît comme un clin d’œil ironique à la convention - car le thème 2, à supposer qu’on fasse la reprise, continuera d’évoluer de 106 à 138 comme si la reprise n’existait pas, contrairement à la tradition voulant qu’en seconde partie de la forme sonate, après la reprise, on travaille un nouveau développement conduisant à la résolution de la première partie vers sa tonalité initiale.

Mais, on l'a dit et redit, la Fantastique n'est pas assujettie è la forme traditionnelle de la symphonie.

Ici au contraire, le thème, que je comparais tantôt à un coda, s’emballe et se fortifie pour exposer, en 138, 31 mesures de chevauchées chromatiques.

 

1.2.3

Mémorisation chevauchées chromatiques:

départ do montée 4 mesures vers mi bémol descente 4 mesures vers do dièse

re-départ do dièse montée quatre mesures vers fa naturel

re-descente fa vers ré dièse

(à noter que les montées sont toujours directes mais que l’avant dernière-mesure de chaque descente monte d’un demi ton sur le 2e temps pour redescendre sur le demi ton suivant la note de départ - simple obligation mathématique, sinon la musique piétinerait sur elle-même :-).

re-re-départ ré dièse vers sol deux mesures descend monte vers la bémol

idem vers si bémol, puis prenant appui sur le la dominante, 6 mesures insistant sur ce la, marquées crescendo molto, puis aboutissant sur 3 mesures de silence absolu.

 

1.2.4

Tonalité sol majeur (bien que l’armure ne l’indique pas)

Reprise du thème 1 en pianissimo, leggierissimo, sempre dolce e ardamente.

Barres 1 (ré à la ronde) à 48

Se pratiquent comme n’importe quel segment rapide de Liszt, en rythmes pour acquérir la vitesse dans l’égalité.

De 48 à 56, poco calendo - facile en apparence mais grande difficulté d’intégration des blanches en triolets à la main gauche. Ne pas se préoccuper des nuances au début, puis intégrer peu à peu le crescendo et l’accelarando vers le coda qui commence en 61 (et qui revient en binaire). Les séquence la-ré-do-si-la sont répétées huit fois. Elles augmentent d’une octave à chaque mesure (non perceptible dans la version orchestrale) mais rendent mieux le crescendo au piano.

Premier aboutissement sur le si bémol, avec accord 5/7 martelé main gauche,

Second aboutissement si bécarre do dièse ré, idem main gauche,

Troisième aboutissement ré dièse mi fa dièse, idem main gauche, mais abrégés rythmiquement de moitié et répétés deux fois.

 

1.2.5

Segment que je surnomme «Fugue de Bach». Il s’agit d’une reprise du thème 2 en mi mineur, avec accompagnement de main gauche à l’aigu. Mesures 1 à 11 se travaillent comme une pièce de Bach. En 12, retour du thème en force (do majeur) vers descente sur trille do-si, sur 29 mesures en diminuendo, débouchant sur le lamento marqué disperato:

1.3.

Lamentoso disperato

 

Barre 1 équivaut à la première mesure écrite sur trois portées (voir image ci-dessus).

De 1 à 48 (3 portées) et de 48 à 51 (fortissimo dominante ré, et dominante sol avant l’explosion fortissimo du thème principal).

Mémorisation:

D’abord et avant tout: ne jamais perdre la mélodie (qui commence avec le hautbois dans la version orchestrale) qui constitue le seul repère. Tout le reste se mémorise par succession de tonalités chromatiques ascendantes et descendantes, mais en visant comme points d’arrivée les dominantes de 48 à 51.

 

En crescendo de pp à fff:

 

Barre 1 à 5: sol majeur

Barre 6: la montée en modulations commence en dominante si majeur

Barre 11 substitution mi mineur - majeur

Barre 13 substitution fa majeur

Barre 14 vers fa dièse majeur

Barre 15 substitution fa dièse en sol bécarre

Barre 16 la bémol (dominante mi bémol)

Barre 17 vers ré bémol (homonymie do dièse)

Barre 18 dominante fa en si bémol devenant si majeur en 19

Barre 20 revient en si bémol descente d’un demi-ton la (dominante mi bécarre)

Barre 21 redescend dominante mi bémol en la bémol

Barre 23 comme en 17 (orthographe en la majeur)

Barre 24 idem 18

Barre 25 idem 19 (orthographe ré dièse)

Barre 26 do majeur

Barre 27 do dièse majeur

Barre 28 redescend do majeur

Barre 29 redescend en si majeur

Barre 30 si bémol vers dominante fa dièse en si majeur (31)

Barre 32 do majeur vers ré bémol en 33 (dominante la bémol)

Barre 34 dominante la bécarre ré majeur

Barre 35 dominante si bémol en mi bémol

ici diminuendo

Barre 36 idem 34 pour descendre en ré mineur en 37

Barre 38 idem 34 et 36

Barre 37 idem 35

Barre 38 (devient obsession) la - ré majeur comme en 34-36-38

Barre 39 idem 35 et 37

Barre 40 reprise du crescendo mi majeur dominante si bécarre

Barre 42 fa dièse majeur dominante do dièse

Barre 43 aboutit en sol majeur (dominante ré)

Barre 44 monte en la bémol sur dominante mi bémol

Barre 45 monte la majeur dominante mi bécarre

Barres 46-47 dernière étape dominante fa, en si bémol

Barre 48 dominante sol pour accéder, con furore, au finale en do majeur

 

En mémorisant cette succession d’étapes et en les regroupant au fur et à mesure que l’oreille assimile la mélodie, et en gardant toujours à l’esprit que la tonalité en main gauche est toujours décalée d’une demie mesure à la remorque de la main droite, ce passage le plus difficile à première vue de la Fantastique devient le plus aisé à jouer.

 

1.4.1  Finale

 

La barre 1 équivaut au quadruple fortissimo marcatissimo

De 1 à 27 se pratiquent comme la fin du Carnaval de Schumann - plein romantisme, accords plaqués, véloces, s’arranger pour que ce ne soit pas trop assommant, tant pour l’interprète que pour l’auditeur.

 

1.4.2 Coda 1

Mémorisation modulations à partir de 28

(marqué animato leggieramente)

Barre 28 quatrième temps si bécarre

les descentes en arpèges sont en syncopes sur le 2e et 4e temps

Barres 28 à 30 si-la-fa dièse-ré dièse la

Barres 31-32 sol mi do dièse

attention, reprise prenant appui sur le do dièse n’est pas conforme:

écouter ce coda et le jouer ne sont pas deux choses pareilles.

 

1.4.3

Coda 2 (religieux)

Les 20 mesures en diminuendo qui précèdent le religiosamente de la fin se comptent en 4 - si évident que cela puisse paraître, mais on les entend toujours en 3 à cause des contretemps.

 

Fin du premier mouvement.

 

Deuxième mouvement: Un bal.

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